Antick — l'espace des objets disparus ou en voie de l'être
La Café
Ustensiles et anecdote
par Jean-Claude Raymond
Table des matières
© Jean-Claude Raymond
Le moulin à café ancien le plus connu est le moulin à café en bois. Sorte de cube avec un tiroir le tout surmonté d'une manivelle. On le rencontrait dans la majorité des ménages. Lorsque j'étais enfant, c'était une promotion de moudre le café. Pour un jeune enfant, ce n'était pas chose facile. Il fallait d'une main coincer la dite boîte entre les genoux et de l'autre tourner la manivelle qui résistait. De temps en temps, plusieurs grains devaient se présenter simultanément entre les meules crantées et arrêtaient brusquement le mouvement de rotation. Pour éviter ce genre de désagrément, il fallait essayer de tourner assez vite. Mais alors, le mouvement de rotation ébranlait la boîte et le café moulu tombait pour une bonne part en dehors du tiroir dont nous avons parlé. Lorsque d'un seul coup, la manivelle devenait libre, nous savions que nous avions fini de broyer les grains. Bien sûr, on tirait le tiroir dans lequel on versait tout ce qui était à en dehors de celui dans le fond de la boîte. L'odeur du café se répandait alors. Ensuite, on versait dans le tiroir tout ce qui s'était répandu dans le fond de la boîte.
© J.-C. Raymond
Le moulin mural est probablement plus ancien. Il est également mu par une manivelle. Les grains de café ne sont pas directement mis près des meules mais dans une sorte de réservoir; dans notre cas en faïence. L'avantage du réservoir était qu'il n'était pas besoin de verser le café sur les meules par petite quantité par un orifice qui n'était pas très large de sorte qu'il y avait toujours quelques grains épris de liberté qui se répandaient sur la table ou sur le sol. Ici, les grains descendaient petit à petit. Le café moulu descendait dans un réceptacle en verre qui se glissait sous les meules comme un tiroir. Ce genre de moulin doit dater des années 1920-1925. L'autre avantage était sa fixité qui permettait d'exercer une force plus grande sur la manivelle.
© Jean-Claude Raymond
Les moulins anciensont vécu jusqu'à l'arrivée de l'électricité. Curieusement, alors que les moulins mus électriquement fournissaient une poudre fine et homogène, le café s'achète de plus en plus moulu d'avance et nous avons vu disparaître, des bords des cheminées ou des étagères des cuisines, les boîtes à épices qui comprenaient toujours une boîte réservée au café.
Cafetière
émaillée et pot à lait au second plan
© Jean-Claude Raymond
Mes parents ne se sont
jamais servi de cafetières en tôle
émaillée. On peut donc penser que l'usage a
dû se situer principalement avant la seconde guerre. Par
contre, ma mère possédait une batterie de
casseroles émaillées et une batterie en
aluminium. Le récipient en retrait est probablement un pot
à lait.
Fernande Germain nous décrit le mode d'utilisation des cafetières du type représenté ici. Elles sont composées de 3 parties. La base où l'on recueille le café qui est passé dans le filtre de la partie centrale - une sorte de passoire. On y déposait le café moulu. A cette époque, on achetait le café en grain et les moulins à café étaient entraînés à la force du poignet. La poudre obtenue était beaucoup moins fine que ce qu'on connaît aujourd'hui avec les moulins électriques. Le café était déposé dans la partie médiane. On versait ensuite de l'eau bouillante sur le café. L'eau passait sur la poudre puis s'égouttait lentement dans la partie basse. Il fallait verser de l'eau plusieurs fois devant attendre à chaque fois que l'eau soit descendue dans la base. On remettait soigneusement le couvercle qui compose la troisième partie de la cafetière pour empêcher le breuvage de se refroidir trop vite et pour en garder l'arôme.
Une fois la quantité désirée obtenue, on enlevait la partie médiane pour servir, sans oublier de mettre le couvercle sur la base.
© Jean-Claude Raymond
Il n'y avait
pas que les grandes cafatières de nos parents et
grands-parents, adaptées à la consommation
familiale. Il existait aussi des modèles pour les personnes
isolées. De plus, les cuisinières ont
abandonné les cuisines. Dans bien des foyers, au moins
l'hiver, la cafetière mise sur un coin de la
cuisinière maintenait le café chaud. Avec le
réchaud à gaz, il n'est pas question de laisser
le gaz brûler toute la journée. Aussi, on s'est
mis à faire le café au moment de le
déguster. Au moins, on ne risquait pas un café
oublié sur la cuisinière et qui avait bouilli. Il
est bien connu que café
bouillu — café foutu. Le filtre
individuel correspond à ce nouveau mode de vie :
préparation au coup par coup et en petite
quantité.
L'objet comprend deux
parties. La base qui reçoit le café qui passe
dans le filtre placé au-dessus. La base sert de tasse et
comporte d'ailleurs une anse. La partie supérieure constitue
le filtre. Son fond est percé de petits trous sur lequel la
poudre de café est disposée. Une grille
démontable vient se visser et comprimer la poudre. En
fonction de la pression choisie l'eau passe plus ou moins vite et donne
un café plus ou moins fort, d'où l'expression café serré.
Mon grand-père qui est né en 1876 et qui était exploitant agricole allait chercher des domestiques de ferme et en particulier des servantes jusqu’à Saint-Jean-de-Monts en Vendée. Cette ville n'étant sur la ligne de chemin de fer Tours-Les Sables d’Olonne, nous pouvons nous demander pourquoi les agriculteurs allaient chercher de la main d'œuvre si loin. Y avait-il dans cette ville une foire annuelle, une sorte de marché d'une importance particulière où les jeunes gens et les jeunes filles cherchaient à se placer. Dans la région de Loudun, nous avons trouvé des femmes, originaires de Saint-Jean-de-Monts et qui ont ou auraient aujourd'hui 80 ans. Elles se sont mariées et ont vécu à Loudun. Les candidats mâles à l'embauche se signalaient en portaient une fleur à la boutonnière. Mon grand-père ne m’a jamais raconté comment se passait la négociation entre les maîtres (c’est ainsi qu’on les appelait, on n’utilisait pas le mot patron) et les futurs domestiques ou servantes.
Dans le cas des jeunes filles, mon grand-père pouvait être amené à se déplacer jusqu’au domicile des parents. Était-ce pour discuter les derniers détails du contrat tacite ou s’agissait-il tout simplement de prendre le baluchon contenant les quelques effets des servantes ? Elles étaient en général assez pauvres. Les familles voulaient se montrer accueillantes envers le futur maître de leur fille. C'était généralement elle qui preparaît le café. Elle devait ainsi montrer qu'elle pouvait être utile dans une maison. Mon grand-père qui n’était pas un amateur de café avait, déjà plusieurs fois, trouvé que celui qu’on lui offrait pouvait avoir des goûts auxquels il n’était pas habitué. Ce n’était pas un goût de café réchauffé. Le café était préparé devant lui. Chacun sait que le café frais est meilleur.
Mon grand-père comprit le jour où il vit la servante, qu'il s'apprêtait à engager, sortir avec un pichet chercher l’eau pour faire le café. Elle se dirigea tout naturellement dans la cour. Elle se pencha, fit un grand geste pour éloigner les canards qui barbotaient dans la mare et qui convergeaient vers elle, espérant quelque nourriture. Stupéfait, il vit la servante plonger le pichet dans l’eau de la mare et ramener l’eau ainsi puisée qui servit à faire le café.
Jean-Claude Raymond
Note
Je ne sais pas donner avec précision la date de cette
scène. On peut supposer qu'elle s'est passée
entre 1910 et 1920.
Aranei-Orbis recherche toute information sur l'existence d'une foire à Saint-Jean-de-Monts ou dans sa région et le placement des domestiques et servantes. Contacts.
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Dernière modification : 2010-02-14 - 19:23:32
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